Ce garçon-là mérite bien une page à lui seul !

Jimi fut ma première perruche savante et ce qu'il m'a appris sur les capacités intellectuelles et langagières d'un oiseau dépasse ce que vous pourriez envisager. Bien sûr, Jimi parlait, mais surtout, il commentait avec justesse les événements de la maison. Jimi m'a appris à considérer que l'hôte ailé était une personne à part entière.

De cette merveilleuse expérience et du savoir que Jimi m'a procuré, naquit l'extraordinaire personnage de 
                                  Twitter ...                                    
      L'autre jour, j'emmène Twitter en voiture. Il est sur sa cage, celle-ci étant retenue par la ceinture sur le siège passager. Twitter regarde la route !
Arrivant à 65 mètres d'un carrefour où le feu passe au rouge, un autobus quitte son arrêt dans la contre allée à droite et vient réduire mon espace de freinage. Twitter s'alerte et me dit " attention ", puis marmonne encore quatre syllabes incompréhensibles.  Sur ces entrefaites, je m'immobilise à l'arrière du bus et l'énorme gabarit du véhicule occupe maintenant tout le pare-brise.
Twitter dit alors  " c'est gros çà ! " ...
Stany.be
"... pas à dire, ce François Premier savait faire des cages !!! "

                                                                                                                                  RÉCIT


Ce dimanche matin, Twitter m'a encore scotché !!
Après m'avoir enjoint de me lever, au fil de commandements affectueux mais structurés, le voici qui passe ses ordres pour le
petit déjeuner !
Il avait dû se mettre les idées bien en place, lorsqu'il s'est venu asseoir sur mon front, achevant ma nuit dans le récit de ses
rêves, dont la complexitude échappa à ma compréhension embrumée!
Oui, un oiseau s'assied aussi : c'est une position hybride entre le "perché" et bien entendu le "couché sur la poitrine".  Posé sur
mon front les pattes bien à plat, les ongles au plus retranchés, une douce chaleur émane de lui et fluctue au gré de son
excitation.  C'est étonnant même, combien cette variable est importante.  Tantôt suggérant la fraicheur, les pattes de ma
perruche peuvent aussi accéder à une température qui ressemble à la fièvre qu’irradient les mains d’un enfant.  Au gré de son
récit, les accents varient, les silences se modulent et les pattes de Twitter changent de température !
Mais ce laïus-là n'a guère d'importance.  Je sais que c'est le soliloque poli dans lequel mon compagnon ne demande pas mon
attention.  C'est pour lui comme les gammes d'un musicien avant le concert, juste une façon de se délier la langue, sans prise de
bec, si l'on peut dire.
Quand je manifestai mon éveil par quelques étirements, je lui fis aussi comprendre avec de petits hochements de tête que
j’étais disposé à l’entendre me parler sérieusement.  L'animal décode très bien le langage du corps et suit le regard de son vis-à-
vis avec la plus grande attention, il interprète aussi très correctement les signes du visage et autres grognements.
Il se rassembla à un moment où je le regardais, puis dit …
    " Bonjour, tu as fait un gros dodo ? ".  Puis, après un temps encore : " On va aller dire bonjour au petit oiseau, on va prendre le
bâton ??, viens, on va là ... ".
Ceci commandait donc de se munir de son petit perchoir portable pour l'installer rituellement devant la glace de la salle de
bains, où il renoue avec son image au quotidien.  Ne faisons-nous pas pareil ?  Je pense aussi, à l’y voir débiter ainsi tout son
savoir linguistique, que l'oiseau ainsi flanqué ne se confond pas le moins du monde avec un autre congénère, mais qu'il évacue,
dans un vigoureux échange, les images et émotions que son cerveau lui suggère avec beaucoup de tension.  L'issue de cette
séquence est toujours, dans ma compagnie, un moment de communication verbale de la plus parfaite cohérence.
    " Tu vas prendre ton bain ? ... Twitter va prendre son bain aussi " me dit-il lorsque j'entrai sous la douche.  Lorsque je finis de
me raser et que ma posture suggéra à nouveau quelque disponibilité, mon compagnon rejoignit en vol mes bras au-dessus de la
cuvette d'évier pour se fondre dans le creux de ma main sous le filet d'eau qui y terminait mon rituel.
Le bain fut bref mais empli de joyeux frétillements.  Quand Twitter rejoignit son perchoir, je l'embrassai, le félicitant pour sa
grande beauté et perçus avec curiosité cette odeur si étrange et particulière du grain moulu et aussi celle d'un oiseau mouillé, il
faut bien le dire !
    " Tu vas chercher, on va manger ... tout de suite ! " acheva-t'il avant même que je me fus couvert pour sortir.  Ce sont là aussi
les paroles habituelles qui commandent mon transit pour la boulangerie et les pains et viennoiseries que nous partagerons ce
dimanche matin.
Ce fut comme un nouveau début pour cette journée que nos retrouvailles !  Je rentre les bras chargés de délectables provisions,
sonnantes dans leur sac en papier brun, dont Twitter reconnait le moindre froissement.  C'est qu'il est gourmand le petit :)  Bien
que responsable de cette heureuse propension, j'en approuve pleinement l'effet, tant il réjouit mon hôte ailé.  C'est, je crois, une
belle réussite que de pouvoir produire quelques réjouissances dans la vie de ce petit être.  Je crois avoir pu associer la notion de
plaisir à bien des concepts de la vie courante d'une petite perruche : boire et manger, mais aussi regarder, toucher, caresser,
voler ou encore s'endormir en ma compagnie.  Mais la vraie avancée tient surtout dans la maitrise de l'abstrait.  Il faut être
témoin de sa notion du temps en rapport avec le langage, l'entendre user du futur et comprendre qu'une ellipse de temps peut
avoir différentes mesures, il faut entendre Twitter dire " il fait chaud " ou encore " c'est bon ça ".  Twitter nuance aussi " moi " et
" toi ", " ici " et " là ", " je" et " tu ", " on " et " c'est "... mais là je sens que je vous perds !
Trônant sur le perchoir installé au milieu de la table, mon compagnon annonce les réjouissances pendant que je garnis l'espace.
    " On va manger ??  Oui, comme ça.  C'est bien, Twitter va manger aussi.  Je suis content tu sais.  Et on va boire un petit peu.
C'est bon ça.  Attention, c'est chaud ".
Nous avons bien ri quand il a découvert la moutarde sur le jambon dans le sandwich.  Twitter aime aussi rire et excelle dans le
choix du moment pour dire " merci ".